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Évolution des systèmes taungya dans les forêts humides de plaine du Nigeria entre 1975 et 1980

J. B. Bail et L. l. Umeh
Département fédéral des forêts. Ibarian. Nigeria

Résumé

Les auteurs examinent les tendances qui ont marqué l'évolution de deux systèmes taungya en usage dans le sud du Nigeria entre 1975 et 1979-1980. Ce sont la taungya traditionnelle, dans laquelle l'agriculteur conserve le produit des cultures vivrières pratiquées pendant la phase d'installation du peuplement forestier, et la taungya en régie, où les cultures vivrières sont faites par des salariés de l'administration forestière, laquelle en garde le profit. La superficie consacrée à lataungya traditionnelle a diminué très légèrement, mais on a noté une forte diminution du nombre d'agriculteurs participant à ce système sans que les raisons en soient très claires. La superficie de la taungya en régie s'est considérablement réduite, pour des raisons administratives et financières. Il y a des chances, cependant, pour que ce système se développe à partir de 1981 dans au moins deux États. L'économie des deux systèmes est devenue beaucoup plus favorable entre 1975 et 1980, en raison de l'augmentation des taxes forestières et de l'accroissement des rendements en volume, ainsi que de la hausse des prix agricoles. Il y a par ailleurs de grandes possibilités de réduction des coûts, en dépit des augmentations de salaires. Les auteurs recommandent de poursuivre /'observation des systèmes taungya, mais d'y inclure dans l'avenir des études socio-économiques.

Introduction

Un des problèmes cruciaux des temps modernes est d'assurer une production alimentaire et forestière suffisante pour faire face aux besoins d'une population mondiale en accroissement constant. Ce problème serait grandement simplifié s'il n'y avait pas antagonisme entre les différents modes d'utilisation des terres, mais c'est là un idéal dont la nature immuable des ressources foncières rend la réalisation impossible. En conséquence, on peut s'attendre à ce que chaque nouvelle demande de terres ajoute à la concurrence et aux conflits possibles entre les différents utilisateurs. Au Nigeria, cette concurrence s'accroît en raison de la poussée démographique, de l'industrialisation, de l'urbanisation et de l'expansion agricole. Selon Allen (1981), les terres de culture occupent près de 35,9 millions d'hectares, soit 39,5 pour cent du territoire national. Les plantations et les projets agricoles occupent seulement 0,3 pour cent de ces terres. La plus grande partie des terres a été appauvrie par la culture itinérante, et sa productivité est faible. Un système d'aménagement qui concilierait différentes productions végétales sur une même parcelle est de plus en plus souhaitable. C'est dans cette optique que la tuangya, qui marie heureusement agriculture et forêt, peut être considérée comme un outil efficace d'aménagement des ressources. Elle a été introduite au Nigeria il y a cinquante-quatre ans, à Sapoba, dans l'État de Bendel, mais en général on ne disposait pas de données quantitatives jusqu'à une date récente. Les informations qui avaient été publiées ont été rassemblées en 1975-1976 par Bell (1977), et le présent exposé a pour objet de présenter une mise à jour de cette étude, et de déceler les tendances qui marquent l'évolution de la taungya au Nigeria.

Les systèmes de taungya

Il existe, à la base, deux systèmes de taungya, que nous appellerons ici taungya traditionnelle et taungya en régie. La taungya traditionnelle est, des deux, le système le plus ancien et le plus répandu dans les tropiques. Elle est largement pratiquée au Nigeria. Dans ce système, des agriculteurs locaux sont recrutés par le service forestier pour entreprendre des cultures dans une zone déterminée d'une réserve forestière. La surface de chaque parcelle varie entre 0,4 et 2,87 ha, selon la superficie totale plantée dans l'année par le service forestier, et selon les dimensions de la famille de l'agriculteur.

Les parcelles sont délimitées et attribuées chaque année entre novembre et décembre. L'agriculteur défriche la brousse, brûle les déchets, et prépare le terrain en général entre janvier et mars suivants. Il y a peu ou pas de dépenses pour le service forestier; dans certains cas il abat les grands arbres avant que les agriculteurs n'entrent dans la réserve. Onyeagocha (1966) indique que les agriculteurs de la réserve forestière d'Emo River étaient peu disposés à cultiver dans des zones couvertes de grands arbres. Dans le cas où ils l'acceptaient, la préparation du terrain exigeait beaucoup de temps, et le programme de plantation forestière prenait du retard.

Pour remédier à cette situation, tous les arbres restants sont généralement empoisonnés après la coupe de bois d'œuvre, mais avant le début des opérations agrosylvicoles. Une fois le terrain préparé, les agriculteurs mettent en place leurs cultures selon les prescriptions arrêtées par le service forestier. Peu après, celui-ci plante les arbres forestiers en intercalaire dans les cultures, en employant une maind'œuvre salariée. Au cours de la première année les agriculteurs entretiennent les cultures vivrières en même temps que les plants forestiers. Entre juillet et octobre de la première année la plupart des cultures sont récoltées. Les agriculteurs mettent de côté de quoi subvenir à leurs besoins familiaux et semer de nouveau l'année suivante, et vendent le surplus. En octobre, il se peut qu'ils préparent une seconde culture telle que le maïs, qu'ils récoltent en décembre ou au début de janvier de l'année suivante, mais il est possible qu'à ce moment-là le service forestier ait repris en charge l'entretien des jeunes arbres. Les agriculteurs continuent parfois leurs cultures pendant deux ou trois ans, après quoi on leur attribue une autre parcelle dans une nouvelle zone. Ceux qui n'ont pas bien entretenu la plantation forestière ne reçoivent pas de nouvelles parcelles.

La taungya en régie a été introduite au Nigeria dans l'État de Cross River en 1971. Elle se fait avec des ouvriers forestiers qui peuvent ne pas avoir d'expérience en agriculture. Elle diffère de la taungya traditionnelle sur les points suivants:

Situation de la taungya au Nigeria

La superficie totale de taungya traditionnelle au Nigeria était en 1979 de 9 226 ha, accusant une diminution de 3,6 pour cent par rapport à 1975 (tableau 1). Dans deux États seulement, Oyo et Ondo, la superficie de taungya s'est accrue, tandis qu'elle a diminué dans les États de Cross River et d'lmo, Kwara et Ogun. La plupart des États n'ont pu accroître les surfaces en taungya, par suite du manque de fonds et de la réduction du nombre d'agriculteurs participants. L'État d'Anambra ne pratique pas officiellement la taungya, mais les ouvriers forestiers continuent de faire des cultures vivrières en intercalaires avec les arbres; on ne dispose pas de données sur ce point dans cet État.

Seuls les États de Cross River et d'Ogun pratiquent encore la taungya en régie, et il y a eu une très forte diminution des surfaces cultivées entre 1975 et 1979. L'État d'Ondo a arrêté cette pratique, parce que les recettes provenant des cultures vivrières allaient généralement à la Division de l'agriculture du ministère; le Projet de reboisement pour le bois à pâte dans cet État l'a remise en vigueur, et environ 250 ha de mais précoce, dolique et mais tardif seront plantés en 1981. L'État d'Anambra envisage également de relancer la taungya en régie au cours de la campagne de plantation 1981.

TABLEAU 1. Superficies de taungya dans le sud du Nigeria en 1975 et 1979

État

Superficie de taungya (ha)

Remarques

traditionnelle

en régie

1975 1979 1975 1979
Anambra 858 - 153 - Aucune concession après 1975. Cultures intercalaires non enregistrées par les ouvriers forestiers.
Bendel 4 606 4 596 - -  
Benue - 220 - -  
Cross River 818 770 992 385  
Imo 494 25 121    
Kwara 621 98 - - Pas de taungya depuis 1978 par manque de forêts.
Ogun 704 460 61 20  
Ondo 1 264 3 000 121 - Arrêtée parce que le produit va à la Division de l'agriculture; sera reprise en 1981.
Oyo 202 55 - -  
Total 9567 9 994 1 448 405  

En 1975, plus de 70 pour cent des plantations, dans la zone de forêt humide de plaine, étaient établies avec l'un des systèmes taungya. On ne possède pas de chiffres sûrs pour 1979, mais il semble que la proportion soit sensiblement la même. Dans certains Etats, on a autorisé les agriculteurs à cultiver leurs parcelles de taungya, mais on n'a pas pu planter les arbres faute de fonds. Ce fait peut amener à surestimer les superficies reboisées, et pourrait avoir pour résultat la perte de contrôle de l'administration forestière sur tout ou partie des forêts classées.

En 1975, il y avait dans les États du sud du Nigeria 24 427 cultivateurs en taungya traditionnelle. On estimait que 19 500 personnes avaient un emploi occasionnel de six à dix semaines dans les cultures en taungya traditionnelle, mais on n'a pu obtenir aucun chiffre sûr du nombre de personnes par famille travaillant dans ces exploitations.

En 1979, cependant, le nombre des cultivateurs en taungya était tombé à 17 744 (tableau 2), en dépit du fait que les surfaces en taungya traditionnelle étaient restées presque identiques, et que dans certains États les parcelles de taungya n'étaient pas plantées d'arbres forestiers. Cette diminution peut traduire le manque chronique de nouvelles recrues pour la taungya traditionnelle (Olawoye, 1975; Ball, 1977). Un autre facteur qui a affecté l'emploi dans la culture en taungya est l'introduction récente de l'enseignement primaire pour tous; il peut y avoir moins de jeunes disponibles dans la famille, d'où un accroissement de l'emploi occasionnel lors des travaux de préparation du terrain, de buttage et de récolte.

En 1975-1976, 1 221 emplois furent créés dans la taungya en régie, soit pour les cultures vivrières soit pour la transformation de leurs produits. On ne possède pour l'instant aucune estimation sûre, mais le chiffre s'est considérablement réduit du fait que les surfaces sont tombées de 1 448 à 405 ha, et qu'il n'y a aucune transformation du manioc récolté en gari. On prévoit que la taungya en régie s'accroîtra dans les États d'Ondo et d'Ogun à partir de 1981.

Au Nigeria les cultures agricoles pratiquées dans la taungya traditionnelle sont nombreuses et variées (tableau 3); leur choix est guidé par les habitudes alimentaires des familles d'agriculteurs ou par les débouchés disponibles plutôt que par leurs interactions avec les arbres forestiers.

L'igname, le maïs et les légumes, qui sont les plus exigeants vis-à-vis de la fertilité du sol, sont cultivés en premier lieu, suivis par le manioc, Il se peut que l'on fasse une deuxième culture de mais, mais le rendement en est faible, et on l'utilise généralement pour les semailles de l'année suivante.

TABLEAU 2. Nombre de cultivateurs et surfaces de taungya traditionnelle dans le sud du Nigeria en 1975 et 1979

État

Nombre de cultivateurs

Superficie moyenne allouée (ha)

1975 1979 1975 1979
Anambra 2 120 - 0,40 -
Bendel 11 376 12000 0,40 0,40
Benne 180 220 1,00 1,00
Cross River 3 580 1 021 0,23 2,00
Imo 1 220 121 0,40 0,26
Kwara 1 202 177 0,52 2,87
Ogun 807 1 150 0,87 0,40
Ondo 3 122 3 000 0,40 0,26
Oyo 1 000 55 0,20 1,00
Total 24 607 17 744    
Moyenne        
pondérée     0.39 0.50

TABLEAU 3. Cultures pratiquées en taungya privée dans le sud du Nigeria en 1975

État Cultures (dans l'ordre décroissant des surfaces)
Anambra Igname, manioc, mais, riz
Bendel Igname, maïs, manioc, riz, banane plantain, légumes, taro, haricots
Cross River Manioc, mars, igname, taro, banane plantain, légumes, sorgho, arachide
Imo Igname, manioc, maïs, riz
Kwara Igname, maïs, manioc, riz, légumes, sorgho
Ogun Manioc, igname, maïs, légumes, riz
Ondo Igname, manioc, maïs, banane plantain, légumes
Oyo Maïs. igname. Iégumes, manioc

Dans la taungya en régie les seules cultures pratiquées sont le maïs, et le manioc Dans l'État de Cross River, dans de rares cas, on fait deux cultures de maïs, la seconde étant utilisée pour la semence. Une innovation sera l'introduction en 1981 du haricot dolique dans le projet de reboisement d'Ondo.

Autrefois on interdisait certaines cultures telles que cacaoyer, hévéa, bananier plantain, etc., parce que ce sont des cultures permanentes ou semi-permanentes qui concurrencent la plantation forestière, et qui pouvaient conduire à l'aliénation des forêts classées si elles restaient assez longtemps en place. Des cultures telles que riz et sorgho étaient exclues en raison de la vive concurrence de leurs racines, et le tabac vraisemblablement à cause de l'anguillule des racines. Le manioc traçant était également interdit, et dans l'État de Bendel, où la taungya a débuté il y a quarante ans, tout manioc était interdit. Ces règles ont maintenant été considérablement assouplies. Le bananier plantain peut être cultivé dans les États d'Ogun, d'Ondo et d'Oyo pour marquer les limites de parcelles, et dans l'État de Bendel sur toute la surface. Le riz et le sorgho sont cultivés dans les États de Bendel et de Kwara et dans les États de l'est.

Les essences forestières plantées au Nigeria sont Gmelina arborea, Tectona grandis (teck), Nauclea diderrichii (bilinga) et Terminalia superbe (fraké ou limba) (tableau 4).

TABLEAU 4. Essences forestières plantées en taungya dans quelques États du sud du Nigeria en 1975

État Essences forestières (par ordre d'importance décroissante)
Anambra Gmelina arborea, teck (Tectona grandis)
Bendel G. arborea, teck, bilinga, fraké (Terminalia superba)
Cross River G. arborea
Imo G. arborea, teck, fraké, bilinga
Kwara G. arborea, fraké, teck
Ogun G. arborea, teck, bilinga
Ondo Teck, G. arborea, fraké, bilinga
Oyo G. arborea

En règle générale les attributaires sont responsables de l'entretien des arbres depuis leur plantation jusqu'à la récolte de la dernière culture vivrière, qui est généralement du manioc. Dans l'État de Bendel, toutefois, le personnel forestier fait le tracé et le piquetage, tandis que les attributaires plantent les arbres. Cette pratique peut entraîner des difficultés, et on a noté une plantation défectueuse et un manque de désherbage dans plusieurs périmètres d'autres États, et en certains endroits les arbres ont été délibérément endommagés.

Tendances économiques

Plusieurs changements sont intervenus depuis la dernière enquête dans les facteurs influant sur le revenu économique et financier de la taungya. Ceux qui sont considérés ici sont les suivants:

On a tenu compte de ces changements pour un nouveau calcul du revenu net actualisé dans les modèles de base utilisés auparavant pour G. arborea et teck (Ball, 1977). La raison pour laquelle on utilise comme base de comparaison le revenu net actualisé et non le taux de rentabilité économique est que ce dernier donne dans certains cas des chiffres trop élevés au point d'induire en erreur. Le taux d'intérêt utilisé pour le calcul du revenu net actualisé était de 8 pour cent. Les systèmes considérés sont la taungya traditionnelle, la taungya en régie, ainsi que la plantation directe (c'est-à-dire non en taungya). Avec l'accroissement actuel des profits et l'abaissement des coûts, le revenu net actualisé s'est trouvé augmenté (tableau 5).

Le taux de rentabilité économique, calculé pour la plantation directe avec les deux essences, est passé pour G. arborea de 5,8 pour cent en 1975 à 18,0 pour cent en 1980; les chiffres correspondants pour le teck étaient de 4,0 et 6,6 pour cent. La comparaison montre que le taux de rentabilité s'est considérablement accru pour G. arborea, ce qui est dû à la fois aux coûts plus bas et aux profits plus élevés. Avec le teck la rentabilité s'est légèrement accrue, ce qui est dû principalement aux coûts plus bas.

La taungya en régie continue de montrer pour les deux essences la meilleure rentabilité, et viennent ensuite, comme précédemment, la taungya traditionnelle et la plantation directe. Il faut souligner que ces accroissements ne valent que pour les chiffres utilisés dans ce calcul, et les responsables qui envisagent des plantations en taungya doivent recueillir les données se rapportant à leurs conditions locales.

TABLEAU 5. Comparaison des revenus nets actualisés pour Gmelina arborea et teck avec différents systèmes d'installation des peuplements (en naira/ha)

 

Gmelina arborea

Teck (Tectona grandis)

Année Taungya traditionnelle Taungya en régie Plantation directe Taungya traditionnelle Taungya en régie Plantation directe
1975 195 387 - 113 - 163 - 109 - 479
1980 1 942 2 489 1 639 8 464 182

TABLEAU 6. Revenu net actualisé pour le teck et Gmelina arborea en taungya traditionnelle, taungya en régie et plantation directe

Système Essence Changements dans le revenu net actualisé
(en naira/ha)
Sensible
une réduction de 25 % des coûts un accroissement de 25 % des taxes forestières
Taungya G. arborea 178 506 aux taxes
traditionnelle Teck 90 95 aux deux
taungya G. arborea 423 506 aux deux
en régie Teck 292 96 aux coûts
Plantation G. arborea 221 506 aux taxes
directe Teck 138 17 aux coûts

TABLEAU 7. Effets sur le revenu net actualisé des encouragements en faveur de la taungya traditionnelle et en régie (en naira/ha)

 

G. arborea

Teck

tradition régie tradition régie
Modèle de base 1 942 2489 8 464
Réduction de 25 pour cent des recettes agricoles et de tous les coûts - 2 445 - 441
Prime d'encouragement de 290 N/ha répartie sur les années 0 à 2 1590 - - -

Pour G. arborea en taungya traditionnelle et en plantation directe, le revenu net actualisé se montre plus sensible aux accroissements de profits qu'aux réductions de coûts, tandis que pour la taungya en régie une réduction des coûts et un accroissement des taxes forestières ont un effet identique. En raison des coûts élevés en début de révolution tant pour la taungya en régie que pour la plantation directe, le revenu net actualisé pour le teck dans ces systèmes apparait plus sensible aux réductions de coûts qu'avec la taungya traditionnelle. Dans cette dernière, il se montre également sensible aux diminutions de coûts et aux accroissements de profits (tableau 6).

Bien que dans les calculs de 1980 on ait utilisé des chiffres plus bas pour les coûts, il peut y avoir encore des possibilités de réduction des coûts unitaires, par exemple par des incitations appropriées ou par un certain degré de mécanisation. Deux types d'incitations sont envisagés: l'un est la fourniture, à prix réduit, aux travailleurs forestiers de denrées alimentaires provenant de la taungya en régie, l'autre consisterait à leur fournir une aide pour les travaux de défrichement, la transformation des produits et l'emmagasinage des récoltes. Dans le premier cas, on admet une réduction de 25 pour cent des coûts, en même temps qu'une diminution de 25 pour cent des profits provenant des produits agricoles. Dans le second cas, un accroissement des coûts de 290 N/ha est réparti entre les années 0 à 2 incluse (tableau 7).

TABLEAU 8. Effet des accroissements de coûts sur le revenu net actualisé (naira/ha)

 

G. arborea

Teck

Tradition Régie Plant directe Tradition Régie Plant directe
Modèle de base 1 942 2 489 1 639 8 464 - 182
Accroissement des coûts de 50 pour cent 1 643 1 528 1 188 -281 -131 -4,
Préparation du terrain 500 N/ha - 2 151 1 301      

TABLEAU 9. Coûts d'installation et profits des plantations

Essence Système Coût (naira/ha) Profit (naira/ha) Coût net (bénéfice) (naira/ha)
Gmelina Taungya      
arborea traditionnelle 369 0 369
(années 0-2) Taungya      
  en régie 1 361 1 455 (94)
  Plantation      
  directe 656 0 656
         
Teck Taungya      
(années 0-5) traditionnelle 315 0 315
  Taungya      
  en régie 1 232 1 455 (223)
  Plantation      
  directe 527 0 527

On estime que ces primes d'incitation sont très généreuses, de sorte que le revenu net actualisé pour G. arborea est réduit et se situe juste au-dessous de celui obtenu avec la plantation directe. Avec la taungya en régie, la réduction de 25 pour cent des recettes agricoles, correspondant à la fourniture d'aliments à prix réduit aux travailleurs, n'aurait pratiquement pas d'effet sur le revenu net actualisé pour les deux essences, à la condition qu'il y ait en même temps une réduction de 25 pour cent des coûts.

Cependant, on ne peut s'attendre raisonnablement à réaliser immédiatement cette réduction des coûts. Avec l'introduction de nouvelles techniques et de systèmes de primes, il faudra, pour former les travailleurs et le personnel d'encadrement, une certaine période au cours de laquelle les coûts seront plus élevés que ceux du modèle de base, et l'on a par suite considéré d'autres hypothèses, avec un accroissement des coûts de 50 pour cent. Pour un autre calcul on a supposé que la plupart des coûts du modèle de base étaient engagés rapidement, mais que les coûts de préparation du terrain étaient de 500 N/ha au lieu de 162 N/ha. Un tel accroissement peut se produire si le travail doit être exécuté à l'entreprise ou avec des moyens mécanisés (tableau 8).

La taungya en régie reste une méthode utile pour accroître les revenus obtenus avec le teck, mais étant donné qu'elle intervient deux fois dans le modèle utilisant G. arborea les revenus sont inférieurs à ceux de la taungya traditionnelle. Si le coût du défrichement dans le modèle de base est trop optimiste, alors les effets sur les revenus obtenus avec G. arborea ne seront pas très importants. L'introduction de salaires pour la surveillance directe ne diminue pas non plus les revenus dans une proportion importante.

On a également proposé d'augmenter les taxes forestières; d'autre part, les rendements utilisés peuvent être dans certains cas sous-estimés. Si l'on admet un accroissement de 25 pour cent des revenus provenant de la plantation forestière, le système de plantation directe avec le teck ne montre qu'un faible accroissement du revenu net actualisé en raison de la longueur de la révolution. Les autres systèmes, en revanche, montrent des gains appréciables.

Les coûts nets d'installation (années 0-2 pour G. arborea, 05 pour le teck) indiquent pour la taungya en régie un profit net en raison des recettes élevées supposées provenir du gari; le maïs, est cultivé à perte (tableau 9).

Une comparaison des coûts de la taungya traditionnelle ou en régie avec ceux de la plantation directe montre des profits financiers nets pour l'administration forestière. La taungya traditionnelle avec G. arborea rapporte net 287 N/ha, et avec le teck 212 N/ha, tandis que la taungya en régie rapporte net 750 N/ha avec G. arborea 750 N/ha avec le teck.

Conclusions

La taungya traditionnelle continue à faire l'objet d'une demande de terres. Le désir de cultiver des terres forestières n'est pas nécessairement motivé par une pénurie de terres agricoles, mais plutôt par la fertilité propre des sols forestiers. L'agrosylviculture n'a pas eu de succès là où il y a des terres agricoles fertiles.

Les superficies de taungya traditionnelle au Nigeria ont légèrement diminué entre 1975 et 1979. Celles de taungya en régie ont connu une baisse importante, due à des difficultés administratives et financières. On s'attend à une reprise à partir de 1981, notamment dans les États d'Ondo et d'Ogun.

Le nombre de cultivateurs en taungya traditionnelle a diminué, tandis que la superficie moyenne qu'ils cultivent a augmenté. Les raisons de ce changement ne sont pas très claires. Il est possible que les cultivateurs en taungya traditionnelle ne puissent pas cultiver une plus grande surface, parce qu'ils ont en majorité plus de quarante-cinq ans (Olawoye, 1975), et que l'extension de l'école à plein temps les empêche de faire appel à de nombreux membres de leur famille. Il se peut cependant qu'ils emploient davantage de main-d'œuvre occasionnelle, ou que la qualité de l'entretien des plantations ait baissé. A ce jour on ne possède aucune information sur ces questions.

Les problèmes de transport du village aux zones de culture subsistent, et pourraient s'aggraver du fait que les nouvelles plantations sont situées de plus en plus loin.

Les agriculteurs sont toujours peu disposés à abattre les grands arbres, ou à payer pour le faire. Certains services forestiers empoisonnent ces arbres, mais d'autres y répugnent en raison des effets secondaires possibles.

Les problèmes de discipline et de contrôle subsistent. Dans un petit nombre d'États on délivre des autorisations, ou l'on fait payer une redevance (qui peut être remboursable).

Il y aurait lieu peut-être de proposer des stimulants aux cultivateurs en taungya traditionnelle. Une formule possible serait de les aider à créer une valeur ajoutée en transformant et en emmagasinant leurs récoltes. Cela entraînerait une diminution des avantages de la taungya traditionnelle, mais ceux-ci sont suffisamment élevés pour supporter une telle réduction. On pourrait même instaurer une prime en argent pour les plantations forestières réussies. Des denrées alimentaires provenant de la taungya en régie pourraient être fournies à prix réduit moyennant une faible perte de revenu, à la condition qu'il y ait accroissement de productivité.

Les rendements agricoles, dans la taungya en régie, restent bas, mais le recrutement d'agronomes pour les projets de deux États devrait améliorer la situation, et démontrer aux autres services forestiers l'intérêt d'un recours à de tels personnels. Ces projets pourraient également fournir des données utiles en ce qui concerne l'élément agricole.

Une analyse des tendances économiques montre que des changements importants sont intervenus dans les profits économiques et financiers entre 1975 et 1980. Les raisons en sont la hausse des prix des produits agricoles, l'augmentation des taxes forestières pour le bois d'œuvre, l'amélioration du rendement des plantations forestières et (éventuellement) la diminution des coûts, en dépit de fortes augmentations des salaires. Le calcul du revenu net actualisé dans différentes hypothèses indique ce qui suit:

La nécessité de poursuivre l'observation des tendances dans les systèmes de taungya est démontrée par les changements importants qui sont rapportés dans le présent exposé, même sur une période aussi courte que quatre ou cinq ans. Les chiffres présentés ici pour les données économiques n'ont toutefois qu'une valeur indicative, et il faudrait faire pour chaque projet des calculs basés sur des chiffres locaux sûrs.

Des études socio-économiques sur les avantages retirés par les agriculteurs, par les salariés forestiers et par la nation seraient nécessaires.


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