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Le bulletin de l’Université des Nations Unies et son réseau international de centres et programmes de recherche et de formation |
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No. 37: Mai - Juin 2005 | |||||
Une étude sur le Danube propose des solutions aux conflits relatifs à l’eau Une nouvelle étude réalisée par l’Université des Nations Unies révèle les limites de la loi internationale sur l’environnement, et le potentiel des méthodes scientifiques pour aider à résoudre les litiges entre les pays qui partagent leurs ressources en eau.
Après la chute du communisme dans les années 90, un litige est survenu entre la Hongrie et la Slovaquie dans un projet de construction d’un barrage sur le Danube. Premier du genre jamais entendu par la Cour Internationale de Justice, ce litige a mis en lumière la difficulté pour la Cour à résoudre de façon décisive de telles questions. Le Danube : La gestion environementale d’un cours d’eau international est l’examen le plus complet réalisé à ce jour de la manière dont le litige a été géré ainsi que des outils scientifiques et processus politiques nouveaux qu’il a nécessités. Les auteurs montrent comment la science est venue en aide à la Cour Internationale. Au lieu de juger le cas directement, la Cour a laissé aux parties la responsabilité de trouver un accord au vu de leurs obligations et des dommages subis par chacun des pays. Pour les estimer, les scientifiques hongrois et slovaques ont conjointement contrôlé et évalué l’environnement afin de déterminer d’un commun accord l’étendue de l’impact causé par le barrage sur l’environnement. Le livre montre que le contrôle de l’environnement ainsi que d’autres techniques scientifiques et outils politiques peuvent aider les pays à réaliser une gestion durable du partage des ressources en eau.
« Il y a 17 pays européens directement reliés par l’eau du Danube, il y a donc un réel risque de conflit si l’un de ces pays agit égoïstement », a affirmé le co-auteur Libor Jansky, un des membres de l’UNU à Tokyo. « La Coopération est le seul moyen dont ils disposent pour éviter des litiges inutiles ». « Les problèmes et les solutions ne sont pas limités à l’Europe », ajoute le co-auteur Masahiro Murakami, Professeur de Développement International à l’Université de Technologie Kochi, au Japon. « Partout dans le monde, les gouvernements deviennent de plus en plus conscients que leur développement économique, social et environnemental dépend d’un approvisionnement suffisant en eau, alors même qu’ils partagent souvent leurs ressources en eau avec d’autres pays. Des conflits vont survenir au sujet de l’eau dans la prochaine décennie si les pays ne parviennent pas à trouver des moyens de résoudre leurs besoins concurrents en cette ressource rare. » Le projet controversé de Gabcikovo-Nagymaros a commencé avec un traité en 1977 entre la Slovaquie et la Hongrie dans le but de créer deux barrages électriques, le contrôle des risques d’inondation et la navigation sur le Danube. En 1989, la Hongrie a suspendu puis abandonné le projet, faisant valoir que son achèvement présenterait des risques graves pour l’environnement et menacerait l’approvisionnement en eau de Budapest. La Slovaquie a rejeté ces arguments et insisté auprès de la Hongrie pour qu’elle remplisse ses obligations découlant du traité. La Slovaquie a par la suite créé un projet alternatif entièrement interne à son territoire, dont la mise en œuvre a, selon la Hongrie, eu des conséquences néfastes. Les parties ont alors porté l’affaire, d’un commun accord, devant la Cour Internationale. Le système de contrôle institué, par voie de conséquence, par les deux Etats sur une bande de 70 km du fleuve est l’un des plus intensifs du monde. Les deux parties se sont accordées sur les experts nationaux chargés d’ entreprendre le contrôle, sur les paramètres et lieux de contrôle, ainsi que sur la fréquence des tests. Pour faire le meilleur usage possible du système, les auteurs recommandent cependant que la Hongrie et la République Slovaque intègrent leurs travaux de contrôle conjoint à ceux de la Commission Internationale pour la Protection du Danube. « Ceci n’est pas seulement une stratégie d’optimisation des coûts réels, mais aussi une nécessité au vu des nouvelles obligations de gestion de l’eau des deux pays résultant de leur récente entrée dans l’Union Européenne. » Se basant sur les leçons tirées de ce litige, les auteurs suggèrent que le contrôle commun des eaux internationales nécessite d’être défini en accord avec des buts scientifiques clairement établis plutôt que politiques, et intégré dans le cadre du contrôle, des structures d’échange des informations et du système de prises de décision au niveau du bassin ou de la région. « La science peut fournir une base objective pour la prise de décision mais les décisions sont inévitablement basées sur des jugements subjectifs de facteurs scientifiques, politiques, sociaux et économiques qui, souvent, vont au-delà des frontières des Etats concernés, » a ajouté Nevelina I. Pachova, un des co-auteurs. « Ces limitations ont besoin d’être clairement reconnues si la science doit effectivement contribuer à la gestion internationale de l’eau. » On estime à 300 les bassins d’eau douce dans le monde qui sont à cheval ou traversent des frontières internationales. En raison de l’accroissement de la population, de la pollution et de la dégradation continue, le risque de conflits liés à l’eau douce va croissant. « La situation du Danube entre la Hongrie et la Slovaquie représente un conflit classique relatif à l’eau et la façon dont il a été traité constitue un modèle pour beaucoup de pays dans des circonstances similaires », a affirmé Mme Pachova. « Gérer des litiges concernant l’eau entre Etats nécessite plus qu’une législation internationale – cela demande une réelle coopération entre les parties concernées, y compris des évaluations conjointes dans les domaines juridique, technique et
environnemental. » |
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